Fils de l'Empire Ep10

 

Les mots du colonel se détachaient, clairs et précis, acérés comme les tranchant d’un rasoir ; le bruit de la foule, soupirs d’appréhension, pouls accéléré… Timrönn Ushur Dann était saturé d’informations par ses nouvelles prothèses auditives. Les surfaces lisses et métalliques qui remplaçaient ses oreilles le faisaient un peu tiquer dans la glace, mais ce n’était pas grand chose comparé au replacement de membres perdus au combat. D’un autre côté, cela changeait aussi le regard que les autres portaient sur lui ; pas même une vraie bataille et il était déjà un vétéran… Mais entre la mort de ses camarades et son transfert à la première compagnie, il doutait franchement d’être à la hauteur.

 

« Je tiens à ce que tout soit clair dans vos têtes, cette opération doit être menée avec maîtrise ; nous ne sommes pas l’armée qui écrase tout sous les pattes de ses blindés, le Commodore veut des prisonniers et des installations intactes pour les équipes d’analystes de l’Ubiqtorat. Si vous recherchez la vengeance ou l’excitation, vous êtes OUT. Me suis-je bien fait comprendre ? »

 

_ OUI COLONEL !

 

La première compagnie était l’épine dorsale du bataillon, la crème des fusiliers ; Japhal Kern était confiant.

 

« Objectif numéro un, détruire les sites de défense anti aérienne ; objectif numéro deux, ouvrir des voix sures pour la force d’assaut ; et objectif numéro trois, rester en vie. »

 

La cinquantaine de soldats en tenue de combat, le visage assombri par le maquillage de camouflage, photographiait mentalement les images aériennes du complexe rebelle. Il régnait cette ambiance pesante, empreinte de solennité, comme avant une danse.

 

« Bien, messieurs dames, largage dans vingt minutes. Pour le clan, le seigneur et l’Empereur ; booyah ! »

 

_ BOOYAH !

 

La compagnie s’ébranla pour rejoindre le pont hangar du Conquérant ; une petite foule les regarda s’harnacher dans les capsules de largage orbitales, ces boîtes de conserve exiguës. Le visage de marbre, et en silence, les bérets rouges troquèrent leur couvre chef distinctif pour le casque noir des fuspas. Timrönn passa la main sous son plastron et caressa machinalement le tissus rouge, la peur au ventre.

 

Vu du sol, les capsules auraient aussi bien pu être de simples météorites entrant dans l’atmosphère ; l’expérience vécue depuis l’intérieur de ces dernières, était comme tenter de chevaucher un Dragon Krayt, un très court moment de peur intense ; juste un homme, un peu de métal, quelques circuits de refroidissement, un répulseur et trois parachutes… Ca et la mort.

 

Le choc fut terrible, la capsule s’ouvrit et Timrönn se retrouva dans la nuit aux couleurs orangées restituée par la visière de son casque ; les autres étaient tous là, il les entendait très clairement malgré le fait qu’ils murmuraient.

 

_ Position défensive, comm, on fait le point.

 

Le soldat avec la radio suborbitale sur son dos, contacta le vaisseau pour rapporter que la section était au complet. Le reste des fuspas formait un cercle élargi, l’arme au poing.

 

_ Objectif à quatre kliks Sud-Sud Ouest, section en avant !

 

Les soldats en noir avancèrent dans la nuit Talusienne, plutôt silencieusement, mais Timrönn avait pour sa part l’horrible impression qu’ils faisaient un bruit de tous les diables. Le moindre cliquetis des équipements montés sur les harnais, les crosses des armes butant contre les plastrons pourtant recouverts d’une fine couche de tissus camouflage… Le moindre son lui ripait sur les nerfs, un vrai cirque ambulant ! Mais à chaque fois qu’ils faisaient le point, il pouvait par contre se plonger dans la nuit, le vent dans les herbes, les grillons et les oiseaux nocturnes ; tout lui apparaissait alors très clairement. Si bien qu’arrivés à l’orée d’un bois, au pied d’une des collines sur lesquelles étaient disposés les sites anti-aériens rebelles, il arrêta juste à temps son mitrailleur. Sans un mot, il désigna une ligne invisible sur le sol ; les fusiliers ne mirent pas longtemps avant de trouver la mine dont le détecteur à ultrasons avait alerté le caporal chef Dann, bientôt surnommé « feuilles d’acier ».

 

Le site était gardé par deux soldats ennemis, un coup facile ; trois fusiliers s’avancèrent en silence, deux le poignard au poing, et un troisième en couverture avec un pistolet à fléchettes ; les deux derniers, le comm et le mitrailleur, étaient restés camouflés.

 

Timrönn se mordit la lèvre, ses jambes tremblaient légèrement à chaque pas qu’il faisait, enfonçant d’abord son talon dans le sol avant de porter son poids en avant ; pas d’à-coups, pas de bruit… Son poignard pesait une tonne dans sa main gantée, et plus il s’approchait, plus la sentinelle ennemie semblait grandir… C’était infaisable.

 

Finalement, il jeta un coup d’œil à son sergent, qui hocha la tête… C’était le moment. Etouffant un gémissement d’angoisse il appliqua aussi fortement que possible l’enseignement qu’on lui avait prodigué ; plaquant sa main libre sur la bouche du soldat ennemi, alors qu’il lui tranchait la gorge. La lame du poignard se frayait un chemin bien trop facilement dans la chair de sa victime, tuer cet homme était si rapide… si facile. Il coucha lentement le cadavre sur l’herbe humide.

 

L’artilleur subit le même sort aux mains du sergent des bérets rouges ; puis le reste de la section prit position alors qu’ils mettaient la batterie laser bi-tube hors d’état de nuire aux bombardiers TIE.

 

_ Comm, rapport situation ; objectif deux, il faut baliser un passage sûr pour les véhicules.

 

Timrönn écouta, essayant de calmer le battement fou de son cœur ; le sergent parlait avec la froideur du marbre, comme si tout ça n’avait été qu’une simple promenade dominicale. Voilà maintenant qu’ils allaient partir faire du déminage en territoire ennemi !

_ Caporal chef, tu peux refaire ton tour de magie de tout à l’heure ? Ca nous faciliterait la tâche.

_ J’vais essayer sergent, si ces trucs émettent des sons ; je devrai pouvoir les trouver.

_ Allez, on bouge !

 

Les fusiliers se remirent en marche, pour aller reconnaître un espace dégagé entre les collines, où pourraient passer les hovercrafts et les VAC.

 

La situation était désespérée ; aux premières lueurs de l’aube, les blindés impériaux avaient fondu sur la base Tango comme une horde de Katarns affamés. Appuyés dans leur assaut par des bombardiers TIE, qui n’avaient pas été inquiétés le moins du monde par les défenses aérienne, restées mystérieusement silencieuses.

 

Anneth’Ko essayait tant bien que mal de détruire les informations sensibles des ordinateurs quand la porte blindée du centre de commandement céda ; à travers la fumée d’une grenade, des traits de blaster fusèrent, fauchant le dernier garde de l’Alliance. Anneth’ dégaina son pistolet et fit volte face, pour défendre chèrement sa vie ; elle tomba nez à nez avec un soldat impérial au visage barbouillé de noir, qui frappa violemment sa main avec la crosse de sa carabine.

 

_ On ne bouge plus !

 

La twi’lek était effrayée, et pourtant, des larmes de rage lui coulaient sur les joues… En quelques minutes, l’Empire avait écrasé une opération qui leur avait pris des mois à monter, et tant de risques !

 

_ Tues-moi !

 

Le soldat paru décontenancé, il était jeune… Regardant la civile qui tenait sa main blessée, il se révéla être au moins aussi effrayé qu’elle. Les artères tendues, la mâchoire serrée, il était lui aussi en colère. Timrönn Ushur Dann cala bien son arme contre son épaule, comme s’il allait tirer… Et il en avait envie. Il haïssait cette rebelle, il haïssait l’Empereur, il se haïssait… Il en voulait à cette foutue galaxie toute entière !

 

Ce fut un moment de lutte intense, Anneth’Ko pouvait le voir dans les yeux du soldat impérial ; il hurla comme une bête enragée, puis baissa lentement le canon de son arme, les mains tremblantes.

 

_ Je sais ce que tu veux faire de moi ! Mais jamais, tu m’entends ? ! JAMAIS ! Tu es en état d’arrestation !

 

Anneth’ ne comprenait pas, elle planta ses yeux dans ceux de l’humain et avança lentement vers lui, les mains levées à hauteur de la poitrine… Ce moment fragile d’incompréhension flotta entre eux quelques secondes, jusqu’au moment où la twi’lek dégoupilla une des grenade acrochées sur le harnais du soldat.

 

Créé le mardi 6 novembre 2007 à 18h37 par Guinch & mis à jour le mardi 6 novembre 2007 à 18h38