Rommor Ep12

Cet endroit inconnu lui était terriblement familier, depuis des années il ne cessait de le visiter et quoi qu’il fasse finissait tôt ou tard par y revenir. Cette pièce aux murs lisses de béton n’était éclairée que par une lampe de plafond blafarde au balancement intermittent, sa lueur allant d’un coin à un autre mettait en évidence des taches brunes sur le sol et les murs ; cette pièce suintait la peur et la souffrance.

Attaché fermement au mur par des chaînes, il pouvait sentir le goût de la bile qui avait remonté sa gorge et franchi le mur de ses lèvres pourtant scellées, son corps n’était qu’un phare irradiant  la douleur que les chocs neuraux et les toxines lui avaient infligé, mais il la savait, comme à chaque fois le pire était à venir.
De sa démarche saccadée, le K-4 avança, grand squelette tubulaire couvert de rouille et de souillures diverses provenant de ses victimes ; au bout de son bras un couteau énorme et dentelé, pas même une vibrolame attendait impatiente de faire son funeste ouvrage d’équarrissage.

Il hurla, pas de bravoure inutile, pas de lassitude pour cette scène qui se répétait à l’infini, juste cette pure angoisse, ce désespoir et bien sûr la douleur, blanche et pure comme l’explosion d’une super-nova. Le couteau tranchait la chair de l’épaule, ripait sur l’os alors que le sang coulait à flots et le droïd forçait, forçait encore jusqu’à casser l’obstacle…Heureusement le choc synaptique arrivait et Rommor Jethro se sentait mourir, libéré de sa souffrance.

Il ouvrit les yeux, encore habillé et étendu sur le lit de l’hôtel, il s’était assoupi…Dehors la nuit était tombée. Il se leva péniblement et traîna les pieds jusqu’à la salle de bains, passant de l’eau sur son visage il fit face à des yeux rougis dans le miroir.

«Alors Cabb toujours ton cauchemar ?»

Rommor grimaça mais cela ne fit que provoquer un sourire usé sur le visage de son interlocuteur, la voix cassée il répondit comme pour briser le silence fantomatique de sa suite, laisser un peu d’humanité réchauffer l’endroit.

«Ca va, on a l’habitude.»

Il fuit le regard moqueur et retourna dans la chambre pour se changer, la réception allait avoir lieu.

«Toujours aucune idée sur qui sont ces types et ce qu’ils nous veulent ?»

Rommor boutonna le haut de son élégante robe grise et soupira.

«Non aucune, c’est un cauchemar, juste un cauchemar…Il ne faut pas chercher à lui donner du sens.»

Ce fatalisme énerva l’homme assis sur le coin du lit, il lissa sa moustache et admonesta Rommor pour le secouer un peu.

«Si on savait alors on pourrait prendre les devants, trouver ces types et nous assurer qu’ils ne viendront pas contrarier nos projets !»

Rommor fit le tour de sa taille avec sa ceinture plusieurs fois, nouant le morceau d’étoffe précieuse il regarda son alter-ego d’un œil torve.

«Nos projets ? Tu veux dire que tu te ranges à mon idée ?»

l’Homme se leva, ajustant le col de Rommor l’air paternaliste.

«J’ai toujours été là pour toi, ça ne changera pas malgré nos différents idéologiques…Si tu veux  que nous passions notre vie avec cette femme et bien soit ! Ce qui m’importe c’est que nous allions bien.»

Dubitatif, Rommor retourna dans la salle de bains et brossa ses cheveux.

«Je ne te crois pas, tu as quelque chose en tête.»

Red sourit dans la glace et débarrassa les épaules de Rommor des quelques cheveux qui y étaient tombés.

«Et bien si tu es si malin, dis moi à quoi je pense vu que c’est aussi ta tête Cabb.»

Rommor grinça des dents en sentant la migraine l’assaillir, il plongea alors la main dans sa trousse de toilette pour avaler deux pilules et faire partir la douleur ainsi que la voix intérieure qui le hantait.

L’Imperator était le plus grand établissement de jeu de Kendamar et même de tout le secteur Lol, ce casino grand luxe était aussi le siège de la branche locale du syndicat…C’est ici qu’avait lieu le séminaire.
Construit au milieu de l’océan à la façon des villes Kamino, cette île artificielle disposait de son propre astroport de classe Impérial ; isolée elle était aussi sécurisée qu’une forteresse malgré son aspect riche et festive. Disposant d’un générateur d’écran déflecteur et de tourelles de turbolasers, l’île était alimentée par un réacteur géothermique et pouvait selon la rumeur se camoufler sous les flots si nécessaire.

Pour l’instant depuis le balcon du grand hall de réception, Rommor Jethro détaillait surtout les membres du service de sécurité, gardes en uniforme bien armés doublés d’une foule d’hommes de main en civil qui dissimulaient des disrupteurs sous leurs manteaux.

«Rêveur capitaine Jethro ?»

Rommor se retourna et reprenant un instant des habitudes d’officier de la marine de sa majesté, claqua des talons avant de s’incliner devant la personne qu’il attendait.

«Lady De’Sillah.»

Splendide comme à l’accoutumée dans une robe de grand couturier Mon Calamari, la pulpeuse femme brune ne trahissait aucune nervosité quant aux négociations à venir. Pourtant les Leukish de toutes les branches du syndicat étaient présents : l’école technique Baradis, la société Galindas Exports, les productions Lucin, l’association de défense Natori, les salles de vente Palkandi et encore bien d’autres…

«Une question si vous me permettez, outre une présentation à nos autres associés, qu’est-ce qui m’a valu l’honneur d’être votre escorte pour ces rencontres ?»

Avalanche De’Sillah et Rommor Cabb avaient partagé un temps les mêmes cercles sociaux, enfants de familles riches et influentes quoi que les Cabb furent plus préoccupés par leur tradition militaire que par la création d’un empire financier, ils avaient en beaucoup de points une éduction similaire.

«Vous présentez bien, c’est aussi simple que ça…Et puis certains de nos financiers Hutt vous apprécient.»

La réponse claire et sans ambages, sorte de marque de fabrique de Lady De’Sillah, satisfit pleinement Rommor ; il appréciait de travailler pour quelqu’un d’efficace.

«S’il vous agréé rejoignons donc nos associés.»

Proposant un bras de circonstance, Rommor Jethro se composa une attitude digne et escorta son Leukish dans la grande salle, restant alerte et à l’affût de la moindre information utile.

La façon dont il avait intégré le syndicat était assez curieuse : réglant le problème des esclavagistes Sennex qui opéraient sur Tatooine malgré l’interdiction de Jabba, Rommor avait poursuivi pendant trois jours et deux nuits leur leader, un traceur du nom de Rommo Vax. Il l’avait rattrapé au petit matin dans la région de la mer des dunes et lui avait fait creuser sa tombe. Abattant toutes ses cartes, Vax avait alors prétendu bénéficier de la protection du syndicat Tenloss… Rommor avait poussé un peu l’homme en lui donnant de faux espoirs de s’en sortir et il avait finalement lâché le nom de son contact sur Lok, suite à quoi Rom’ avait placé un trait de blaster dans la nuque du fâcheux et arraché son cœur pour le ramener au Kajidic, prouvant ainsi que le contrat avait été mené à son terme.

Une lettre sobre avait été adressée à Lady De’Sillah, la rencontre n’avait ensuite pas tardée ; il y avait à Mos Atlas, juste dans la maison jouxtant celle de Rommor, un modeste magasin…Le visitant un soir, il fut surpris d’y être abordé par Avalanche De’Sillah à qui le magasin appartenait. Après une brève discussion sur la guerre civile, elle jugea que l’homme en face d’elle était une adition intéressante au syndicat, elle l’emmena alors au port franc de Red Mountain.

L’entrevue qui suivit dans un des locaux du syndicat fut des plus instructives, Avalanche De’Sillah outre se montrer un leader efficace semblait savoir prendre les choses en main, fussent-elles les armes. En garde Koh, son Dorzhul rouge trempé de sueur, Rommor esquiva avec difficulté l’assaut de son adversaire, il pu placer deux parades mais le troisième coup du tranchant ne fut évité qu’au prix d’un repli acrobatique et désordonné…Pour quelqu’un qui se piquait de savoir tirer, Rommor du admettre qu’il avait sérieusement manqué de pratique ces derniers temps. La coupure dans les boudins de sable entourant son plastron confirma au jeune homme qu’il s’était trop reposé sur la vibro-dague et le blaster récemment.

«Il faudra un peu vous entraîner mais vous pourrez très bientôt vous montrer utile au syndicat.»

Le capitaine Jethro sourit et salua son adversaire, mais dans son esprit c’étaient surtout les sommes nécessaires à l’accomplissement de ses projets d’avenir qui se mirent à défiler. Oui, quelques millions ne seraient pas de trop pour crédibiliser sa couverture, et ensuite…

La patience est la vertu primordiale du chasseur.

l’Homme en noir de l'Ubiqtorat avait raison à ce propos, Therion de Mandalore recelait de nombreux axiomes guerriers dont les vérités transcendaient les siècles.

Créé le samedi 2 juin 2007 à 23h32 par Guinch & mis à jour le mercredi 20 mars 2013 à 14h06