Il s’éveilla avec la brise, il était en sueur, de retour du cercueil spatial qui hantait ses nuit ; le temps de se réorienter, le souffle paisible de Moira endormie, il ne faisait pas encore jour.
Il fit quelques pas et machinalement vérifia le berceau des enfants, il fut surpris d’y trouver les petits yeux de sa fille grands ouverts, le contemplant. Il saisit délicatement Deseanna et la plaça tout contre son épaule, il aimait le contact de sa peau; ses pas le menèrent jusqu’au balcon et là-bas sur les eaux de la baie, une lueur blafarde commençait à monter.
A mesure que le soleil se tirait doucement hors de la mer, Rommor sentait la vie revenir en lui avec une force nouvelle, il ferma les yeux pour contempler la lumière à travers le filtre rouge de ses paupières closes. D’un geste rituel il passa la main devant son visage, puis il en fit de même pour sa fille.
«Place ton espérance en lui, il finit toujours par nous tirer des ténèbres.»
La langue était un peu rauque, étrange, mais rassurante… Il n’avait pas pratiqué la prière des révélations depuis trop longtemps.
«Pour la suite tu es encore trop jeune ma fille, tu vas retourner te coucher et papa ira chasser les ténèbres pour toi.»
Il reposa Deseanna dans son berceau et s’empara simplement de la jupe de son Dorzhul, pour descendre sur la plage. Le rite de révélation se pratiquait à jeun en simultanée au lever du soleil, il avait beaucoup perdu de son sens religieux au fil du temps, mais étrangement Rommor se sentait rattrapé par ses obligations à présent qu’il avait des enfants.
Sur la plage une silhouette solitaire se mit à accomplir les trois cercles de la main :
Le marteau, poings fermés, qui était très pénible à exécuter dans le vide.
La lame, qui du tranchant de la main paraît ou attaquait, du bout des doigts frappait aussi d’estoc.
La serre, avec ses saisies cruelles et complexes.
A l’aide de ces armes il repoussait les ténèbres et accompagnait l’avènement triomphant du soleil ; affrontant ses démons intérieurs et les taillant en pièces dans ce combat imaginaire. Lorsqu’il revînt enfin à sa position de départ, le soleil s’était entièrement levé ; Rommor prit une longue inspiration en fermant les yeux, puis souffla, expulsant les dernières ombres de la nuit.
Ayant pris une bonne douche, il s’activa à préparer le petit déjeuner dans la cuisine ; il était tôt et il avait encore du temps avant que Moira ne se lève, elle détestait le voir en uniforme. Comme un bon spationaute, son esprit se remit à fonctionner à plein régime dès que la première tasse de carburant bien noir toucha son estomac, à présent il avait besoin de penser comme un espion…Paranoïaque, calculateur et sans pitié.
Il se mordit la lèvre inférieure, l’idée résultant de ses computations était arrivée, il la désapprouvait profondément mais en même temps savait qu’elle s’imposait d’elle-même ; il n’avait pas le choix. Saisissant les clés de son landspeeder, il gagna le garage.
Trente-cinq minutes suffirent à mettre son plan à exécution, un passage rapide par le QG sectoriel de Keren et le message fut envoyé, simple et en apparence inoffensif.
EXP : Cpt.V Cabb
DEST : G.Adm ZaarinMonsieur,
J’ai l’honneur de recommander le capitaine de frégate Mona Gillis à votre service, officier compétente et dévouée, elle a servi sous mes ordres à bord du croiseur d’intervention Glaive et a été blessée en accomplissant son devoir durant la bataille de Sepan.
Le capitaine Gillis se trouve actuellement en congé pour raison médicale, vous comprendrez que je sois soucieux de ne plus la soumettre aux rigueurs du combat, mais souhaite néanmoins voir ses compétences servir au mieux la marine impériale.
Gestionnaire efficace, bonne tacticienne, je pense que vous trouverez en elle une candidate de choix pour intégrer votre commandement ; pour ma part je ne saurai espérer lui trouver de meilleur affectation que sous vos ordres.Espérant que vous prendrez en considération cette requête amiral, veuillez agréer mes plus respectueuses salutations.
Rommor Irius Cabb
Il ne restait plus qu’à confier à Mona une boîte de cigares à offrir au grand amiral avec les compliments du capitaine Cabb, le disque d’informations caché à l’intérieur ferait le reste, et le contact serait établi sans laisser de trace. En cas de problème, Mona Gillis servirait de fusible entre les conjurés ; au vu de sa relation avec le défunt capitaine Armando Vassard, personne ne douterait de ses motivations.
S’étant changé, Rommor monta sur la pointe des pieds jusqu’à la chambre, portant le petit déjeuner à son épouse.
«Bonjour mon amour, réveilles-toi, c’est une très belle journée qui commence. »
Là dehors, dans l’espace, une série de chiffres se propageait via l’holo-net naval, et avec elle, le mécanisme complexe d’une machination visant à assassiner l’Empereur de la galaxie, s’était mise en marche. C’était le chemin.