Rommor Ep34

n. b. Ce texte aurait du être publié APRES un texte traitant des croyances et techniques de combat des gardes solaires de Thrysus, dans ce contexte, le terme flamme désigne un combattant de la foi. Le culte des gardes solaires étant basé sur une trinité incluant le feu, le sang et l’acier.

Un silence de mort régnait parmi tous les hommes en Dorzhûl noir qui formaient un carré autour du cercle de combat… Là, les deux combattants se faisaient face, immobiles. Le cercle était recouvert de sciure de bois, pour absorber le sang.

Le Kosh’ra est une épée courte, une lame lourde aussi contondante que tranchante ; à l’origine c’était une simple faucille agricole. Lorsque les gens du clan Cabb arrivèrent sur Chandrila, ils en firent rapidement une arme que la connaissance Thyrsus de la forge rendit terrible, l’adjonction d’un motivateur de vibrations soniques  permettait de trancher un membre par la seule force de l’inertie. Les premières guerre domaniales furent un bain de sang, les Cabbs et leur armée étendirent leur emprise sur tout le continent occidental de la planète verte en seulement quelques mois… Chandrila n’avait jamais vraiment connu la guerre auparavant.

Un combat sans armure au Kosh’ra, se terminait généralement en deux coups : le premier mutilait, le second tuait. Evidemment, quelques variations étaient possible comme un premier coup mortel, possibilité à prendre en compte quand un des combattants était le seigneur Cabb en personne.

L’assemblée de gardes royaux attendait, ils ne voyaient jamais que quelques « invités » très particuliers venir s’entraîner dans leur salle ; généralement des maîtres réputés à qui le Lord Protecteur voulait se mesurer.

Mais cet adversaire-ci… Ils l’attendaient depuis longtemps.

Gemahad Farà accueillit l’officier dans son uniforme gris impeccable, ce fut sa première déception, un officier de marine… Il ne ressemblait pas du tout à ce à quoi il s’attendait, un visage terriblement neutre, couvert par une barbe courte et bien taillée ; il avait l’air fait pour évoluer sur un pont de destroyer ou une à une réception de la cour.

«Vous pouvez vous changer ici, il y a une tenue à votre...»

Il ne finit pas sa phrase, l’homme l’apostropha froidement dans la langue secrète.

«J’ai mon Dorzhûl, flamme, vous pouvez disposer.»

Gemahad trouva tout de suite l’homme prétentieux et détestable, cette sensation s’accrut lorsqu’il pénétra la salle d’entraînement en arborant un Dorzhûl rouge ! Il ne se prenait vraiment pas pour n’importe qui décidément.

Mais là, dans le cercle, le moment était venu de vérifier si cette prétention se basait sur le fondement d’une supériorité véritable.

Sans avertissement, ils se ruèrent l’un sur l’autre, hurlant de rage ; les lames se heurtèrent et dévièrent sur le côté ; le seigneur Cabb enfonça son adversaire d’un coup de son épaule métallique et l’envoya au sol. L’Adversaire lui jeta une poignée de sciure dans les yeux et se redressa, son Kosh’ra heurta une première fois celui du Lord Protecteur, puis arrêta son bras cybernétique avant qu’il ne le frappe, ensuite un vicieux coup de pied frontal dans l’aine fit reculer le connétable de la garde royale.

Cet échange bref s’arrêta là, les deux hommes reprenant leur souffle en se jaugeant du regard.

De nouveau des hurlements, les combattants se bloquèrent dans une épreuve de force aux poignets ; l’adversaire tenta une balayette, il reçut de plein fouet un coup de tête. Il avait tenté de reculer au dernier moment, mais le front du seigneur Cabb lui écrasa néanmoins la lèvre, la faisant éclater dans un flot carmin. Les deux combattants retournèrent à leur position de départ.

«Ta femme doit être bonne au lit, elle te fatigue, tu es aussi vif qu’un Hutt.»

Le seigneur Cabb était rarement grossier, l’injonction surprit les gardes… Elle arracha un ricanement sec à son adversaire qui répliqua sur le ton de la conversation.

«Ma femme, elle au moins, couche dans mon lit.»

L’effet fut immédiat, le visage du vieux Vornsk se changea en un masque de mort ; avec un nouveau hurlement bestial, les combattants s’élancèrent dans la mêlée. Les coups redoublés du seigneur Cabb étaient d’une vitesse et d’une violence rare, son adversaire ne pouvait que faire de son mieux pour essayer de bloquer son Kosh’ra et sauver sa vie. L’assistance jubilait en silence devant cette nouvelle démonstration de l’invincibilité de son mythique capitaine.

Il se produisit alors, quelque chose qui frappa à jamais de stupeur les gardes présents ce jour-là à l’entraînement… L’adversaire, de nouveau au sol, jeta son arme et étendit les bras, offrant sa poitrine au coup qui allait le tuer.

Et le bras tremblant de rage du seigneur Cabb s’arrêta.

L’homme au Dorzhûl rouge se releva lentement, ne lâchant pas du regard son adversaire, et il le désarma avec douceur.

«Vous êtes vaincu, père… Il n’y a rien de plus que vous puissiez me faire, vous m’avez déjà mutilé, et tué aussi. Je ne vous crains plus, c’est là la limite du pouvoir de la violence.»

Un frisson d’incompréhension traversa la salle, Lorn Irrin Cabb sourit calmement, et sans crier gare, l’homme au Dorzhûl rouge lui asséna un violent coup de pommeau à la tempe, le plongeant dans l’inconscience.

«Mais ne crachons pas trop sur les bonnes choses, parfois ça soulage!»

Il fit un tour de la salle du regard, contemplant les gardes incrédules, puis laissa tomber le Kosh’ra au sol et sortit avec un rire nerveux confinant aux larmes.

Gemahad Farà fut convoqué par le Lord Protecteur lorsque celui-ci reprit conscience, il l’attendait dans ses quartiers privés. Ils étaient aussi spartiates que l’on pouvait s’y attendre pour un homme pareil. Une antique armure laquée rouge sang sur noir de nuit trônait dans la salle, elle fit forte impression au garde royal qui lui trouva une ressemblance avec sa tenue, quoi qu’elle fut plus primitive, plus agressive.

«Faites porter cette armure à la résidence du capitaine de vaisseau Cabb.»

La déception traversa sûrement l’attitude corporelle de Gemahad, car le vieux Vornsk laissa son regard peser sur ses épaules.

«Qu’avez-vous tiré comme leçon du combat d’aujourd’hui Prétorien?»

Il y avait une foule de réponses, certaines pouvant lui coûter la vie, qui passèrent à l’esprit du soldat d’élite… Il n’eut pas le temps d’en formuler une seule, visiblement fatigué, le Lord Protecteur dévoila le fond de sa pensée.

«La foi fait la flamme, pas seulement la technique.»

Lorn Irrin Cabb était très bien placé, pour savoir qu’il n’y a pas de tueur plus motivé, que celui légitimant ses actions par la défense des siens…

Créé le dimanche 3 juin 2007 à 0h38 par Guinch & mis à jour le mercredi 20 mars 2013 à 14h06