Rommor Ep59

 

_ Tout est fini, capitaine.

 

Sous le commandement du traître, les soldats des troupes de choc s'avancèrent pour passer les bracelets magnétiques à Rommor Irius Cabb ; il avait échoué.

 

Et pourtant, l’opération Chimère était un plan bien élaboré...

 

L’Empereur quittait sa retraite sur Naboo de façon discrète, dans une navette de classe Lambda escortée de deux intercepteurs TIE.

C’étaient trois navettes qui prenaient leur essor en même temps, deux leurres et la cible ; puis elles passaient en hyperespace à destination de points de rendez-vous avec des unités de la marine impériale.

Personne à part l’Empereur ne savait quel navire le ramènerai à Coruscant, et il n’en faisait part aux équipages des navettes qu’au moment de passer la barre de l’hyperespace.

 

Les conjurés avaient patiemment étudié les plans de vol et procédures que Rommor avait extorqués au défunt général Horst durant l’affaire Sirène. Il avait dès lors été facile de placer des vaisseaux aux équipages fidèles à a cause en position pour être « choisis » comme possibles courriers de l’Empereur.

 

L’Alliance rebelle assurerait sa part du travail, ses chasseurs stellaires hypercapables surgissant pour harceler les forces loyalistes et les tenir loin de l’opération.

 

C’était le plan, et rien ne s’était déroulé comme prévu…

 

 

 

[BUREAU DU COMMANDANT, BASE NAVALE DE BILBRINGI, OPERATION CHIMERE H-7]

 

_ Mais c’est inadmissible !

 

Rommor écrasa ses poings gantés de noir sur le bureau du vice-amiral Solon, ce dernier fut tellement saisi de stupeur qu’il ne le remit même pas à sa place.

 

_ Le Conquérant est tout à fait en état de prendre l’espace, le capitaine Varlan m’a assuré que ses hommes avaient terminé les réparations sur ses déflecteurs !

_ Capitaine Cabb, notre inspection a révélé des micro fissures sur la coque du Conquérant, plusieurs sections sont concernées et de telles réparations prendront du temps.

 

Rommor était furieux, remarquer les micro fissures à moins de deux heures de l’appareillage de son escadre, les techniciens du bassin de réfection avaient vraiment salopé leur boulot suite à la collision entre le Conquérant et le vaisseau de l'amiral Klein, le Marteau de Guerre. Le jeune capitaine fit quelques pas dans le bureau du commandant de la base navale de Bilbringi, essayant de se calmer. Il venait de passer à deux doigts de l’insubordination, mais il risquait surtout de passer à quelques heures de la fenêtre d’intervention pour l’opération Chimère. Solon se leva, il avait vraiment l’air contrit.

 

_ Ecoutez Rommor, je comprends très bien votre embarras mais… Hum… Ceci restera entre nous, les ordres viennent de plus haut cette fois.

_ Je ne comprends pas monsieur, la cinquante septième escadre est gardée à quai intentionnellement ? Mais par qui ?

_ Vous savez qui est mon supérieur, le grand amiral responsable de la recherche, du développement et de la construction navale.

_ L’amiral Zaarin ? Mais, c’est impossible !

 

Rommor se laissa tomber dans un fauteuil, abattu… C’était pourtant évident, on avait jugé qu’un élément faisait de lui un risque pour l’opération ; sa possible loyauté pour son père, peut-être.

 

_ Excusez-moi amiral, je suis un peu déçu… Cela devait être notre première mission de combat.

_ Vous êtes un bouillant jeune homme, mais vous apprendrez la patience mon ami ; c’est une qualité essentielle chez un officier supérieur, et pour un père.

_ Vous avez parfaitement raison, je vais retourner à bord du Protecteur.

_ Attendez Rommor, si vous ne voulez pas rester à quai, j’ai une mission pour un de vos bâtiments ; il faudrait acheminer des pièces d’hyperpropulseur pour un Victoire-I coincé à quelques parsecs d’ici. Tous mes remorqueurs sont de sortie, aussi cela me rendrait un fier service.

_ Le Protecteur est le plus rapide de mes vaisseaux, de plus, avec la taille de son pont hangar, cela accélérera d’autant le transbordement des pièces.

 

Malgré son amabilité de façade, Rommor enrageait intérieurement d’avoir été écarté de l’opération Chimère… Mais peut-être était-ce plutôt le lien avec sa mère qui posait problème à Zaarin ? Il craignait de le voir se rallier à elle et à l’Alliance ; ce qui signifiait que Rommor serait aussi mis de côté lors de la suite des événements et du partage des fruits de la victoire.

 

Tous ces risques pour se voir évincer au dernier moment ! Avec un sourire amer, Rommor considéra qu’à la place de Zaarin il aurait peut-être fait pire s’il avait jugé qu’un de ses subordonnés représentait un risque pour sa prise de pouvoir. Solon retourna derrière son bureau et rédigea rapidement l’ordre de mission, qu’il remit ensuite au commandant de la cinquante septième escadre.

 

_ Le commandant de l’IVD Vanguard sera sûrement soulagé de recevoir ces pièces plus tôt que prévu, je donne les ordres pour qu’on les prépare à être chargées à bord du Protecteur immédiatement.

_ A vos ordres monsieur.

 

Il fallut moins de trois heures au Protecteur pour rejoindre la position du Vanguard, les deux vaisseaux de la même classe se ressemblaient comme des jumeaux. Le Vanguard ne semblait pas avoir subi de dommages extérieurs, son hyperpropulsion avait donc connue une avarie. Mais Rommor devait lutter pour se concentrer sur les détails de sa mission, quelque part ailleurs dans l’espace profond, l’Empereur de la galaxie allait être assassiné… Et son père, mourir. Pendant ce temps, écarté de l’histoire en marche, Rommor jouait les livreurs.

 

_ Le Vanguard nous hèle monsieur.

_ Passez sur haut parleur, enseigne Juli.

 

La voix était froide et maîtrisée, Rommor fut immédiatement frappé par l’image mentale de son possesseur, issue de ses souvenirs.

 

_ Salutations Protecteur, ici le vice-amiral Thrawn à bord de l’IVD Vanguard.

_ Mes respects amiral, ici le capitaine de vaisseau Cabb.

_ Heureux de vous entendre capitaine Cabb ; je vois que votre astrogation s’est améliorée, vous avez été rapide.

_ Concours de circonstance monsieur, nous étions disponibles aussi Bilbringi nous a détaché pour vous porter assistance.

_ Voilà qui tombe bien, commencez les opérations de transbordement sans plus attendre, je vais monter à votre bord si vous n’y voyez pas d’inconvénient.

_ A vos ordres monsieur, vous serez le bienvenu.

 

Mais les politesses étaient vides de sens, Thrawn ne demandait jamais la permission pour faire quelque chose qu’il estimait nécessaire ; c’était un homme économe en actes comme en paroles, aussi sa visite devait avoir un but bien précis ; ce qui n’était pas pour rassurer Rommor Irius Cabb.

 

_ Second, à vous le quart ; je descend au hangar pour accueillir l’amiral.

_ A vos ordres monsieur, le second prend le quart.

 

Les bérets rouges prirent position dans le hangar, en cas de coup dur, Rommor préférait avoir sa garde prétorienne autour de lui. La navette en provenance du Vanguard ne mit pas longtemps avant d’apponter ; et c’est sans cérémonie que le vice-amiral Thrawn, fils prodige et mal aimé de la marine impériale, monta à bord du Protecteur.

 

_ Amiral.

_ Capitaine Cabb, je vois que vous avez rendu au vaisseau de l’amiral Harkov un air plus… impérial. Mes félicitations pour votre promotion, commander un groupe de combat n’est pas une chose fréquente pour un officier de votre âge.

_ Merci monsieur, si vous voulez bien me suivre.

 

Ils se rendirent rapidement jusqu’au bureau de Rommor, sans échanger un mot sur le parcours, pour Thrawn cela pouvait être normal aussi bien qu’alarmant. La porte se referma sur eux, et le vice-amiral accorda rapidement son attention à l’antique armure disposée près du bureau.

 

_ Intéressant.

_ Puis-je vous demander la raison de votre présence à mon bord, monsieur ?

_ Il s’agit d’une précaution, nous pourrions avoir besoin de quitter le secteur avant que l’hyperpropulsion du Vanguard ne soit redevenue opérationnelle.

_ Y a-t-il un motif particulier à cette urgence et dont je devrais être au fait ?

_ Bien sûr, c’est votre vaisseau après tout, capitaine.

 

Thrawn retourna ses yeux rougeoyants vers Rommor, mais ce dernier était prêt à soutenir son regard inquisiteur, ce n’était pas leur premier affrontement de ce type.

 

_ Le Protecteur est le vaisseau de sa majesté, aussi est-il à votre disposition.

_ Sa majesté… C’est justement la raison de ma présence ici ; vous n’êtes pas sans le savoir, ma promotion a du s’accompagner d’un exil dans les régions extérieures, le prix à payer pour un non-humain afin de s’élever dans la hiérarchie.

_ Vous m’en voyez désolé, monsieur.

_ Mais j’ai reçu un message assez énigmatique de la part de l’Empereur, il y a deux jours de cela ; un message m’ordonnant de revenir vers les mondes du noyau, toutes affaires cessantes. C’est en poussant notre hyperpropulsion dans sa zone rouge que nous avons connu l’avarie qui immobilise actuellement le Vanguard.

 

Palpatine ! Ce diabolique vieillard était comme une maladie que l’on arrive jamais à éradiquer complètement, malgré toutes les précautions des conjurés, il avait senti le vent tourner. Thrawn fit face à Rommor, toujours empreint de son air serein et détaché.

 

_ Quoi que j’aie parfois des doutes concernant les pressentiments de l’Empereur, force est de reconnaître qu’ils se sont avérés exacts à bien des reprises.

_ Nos effectifs dans le centre de la galaxie sont réduits, avec la flotte expéditionnaire du seigneur Vador encore dans la bordure pour traquer les rebelles.

_ Analyse tactique pertinente capitaine.

_ L’amiral souhaite-t-il m’accompagner sur la passerelle de commandement ?

_ Pas tant que cela ne s’avérera pas nécessaire, ne sapons pas votre autorité.

 

Malgré le danger qu’il représentait, Thrawn était un officier formidable ; et par bien des aspects, Rommor l’admirait depuis qu’il avait fait sa connaissance à bord du Diligeant, des années plus tôt. Alors qu’il avait commandé le Hérault, un puissant destroyer de classe impérial, en tant que commodore ; voilà que promu au grade de vice-amiral, on avait expédié cet atout tactique majeur à l’autre bout de la galaxie à bord d’un destroyer de classe victoire… Si l’Empereur mourrait, il l’aurait plus que mérité.

 

_ J’ai cru apercevoir de nouveaux modèles de chasseurs dans votre pont hangar.

_ Le nouveau TIE Avenger monsieur, intercepteur de supériorité spatiale hypercapable.

_ Impressionnant, je ne pensais pas qu’il avait déjà été déployé parmi les unités de ligne.

_ Il s’agit du premier escadron d’active amiral, mon CAG, le lieutenant colonel Durnin serait fier de pouvoir vous briefer à son sujet si vous le désirez.

_ Ne le dérangez pas, dites moi plutôt ce que vous en pensez.

_ Du point de vue d’un pilote, c’est une machine impressionnante avec une survivabilité accrue au combat.

_ Et du point de vue du stratège ?

_ Trop peu, trop tard ; l’Avenger est cher à produire, dur à maîtriser, et ses capacités ne sont pas significativement supérieures à l’aile-X rebelle. Si ce n’est pour son hyperpropulsion, je lui préfère le TIE Interceptor amiral.

_ Le grand amiral Zaarin serait peiné d’apprendre que vous dénigrez son projet.

 

Alors voilà où il voulait en venir… Rommor sourit comme s’il était de connivence avec Thrawn, utilisant ce même sourire qu’il avait offert à la galaxie durant ses années d’espionnage.

 

_ Il faut parfois savoir décevoir ses supérieurs pour rester un officier consciencieux.

 

Thrawn sembla évaluer la réponse.

 

_ Nous savons que c’est là une habitude que vous cultivez capitaine… Et vous l’avez déjà payée au prix fort par le passé. Prenez bien garde car en agaçant le mastodonte de notre hiérarchie avec votre audace, il pourrait bien finir par vous écraser.

 

Rommor ne savait pas quoi conclure de cette déclaration, son intendant glissa silencieusement dans le bureau, interrompant les officiers.

 

_ Le déjeuner est prêt à être servi dans le carré du capitaine.

 

 

 

[IVD PROTECTEUR, OPERATION CHIMERE H+1]

 

Un message d’alerte prioritaire venait d’être émis par l’ISD Majestic, le destroyer venait de subir une mutinerie en règle alors que l’Empereur montait à son bord ; le vice-amiral Thrawn ne fut pas surpris le moins du monde lorsque Rommor lui lut le message Flash annonçant le kidnapping de l'Empereur par les insurgés.

 

_ Le Majestic ? Je crois avoir une idée sur l'adversaire que nous affrontons... Bien capitaine Cabb, il est temps de nous mettre en chasse ; je retourne à bord du Vanguard, je vous brieferai en route pour notre rendez-vous

_ Notre rendez-vous ?

_ Je ne suis pas le seul à qui l’Empereur a envoyé un message, nous allons retrouver le seigneur Vador qui amène avec lui un avantage tactique de poids.

 

Rommor pencha légèrement la tête, affichant un air curieux… Mais intérieurement il calculait effrayé, il était impossible que le nouveau vaisseau amiral de Vador, l’Executeur, ait pu revenir de la bordure extérieure aussi rapidement… Même un croiseur de classe Carrack avec son hyperpropulsion poussée dans le rouge ne pourrait pas l’amener ici à temps ! Thrawn devina peut-être les pensées de son subordonné, et apporta la réponse à sa question.

 

_ Vous n’êtes pas le seul à être arrivé à la conclusion que l’Avenger de l’amiral Zaarin n’était pas l’arme que nous attendions, nous avons développé d’autres alternatives, et c’est avec l’un de ces prototypes que le seigneur Vador nous a rejoints.

_ Je vois.

_ Bien, assez parlé ; il est temps de « châtier les traîtres de façon exemplaire » si je puis vous citer.

 

Rommor pâlit, bien sûr il aurait du se douter que Thrawn, s’intéressant à sa carrière, avait consulté le dossier d’instruction de son procès pour la mutinerie du Vigilant ; mais de là à se souvenir de ces mots ? Rommor lui-même avait souhaité oublier le zélote qu’il avait pu être, et Thrawn le lui relançait au visage comme une gifle, comme s’il savait exactement où se trouvait sa loyauté aujourd’hui.

 

Le vice-amiral Thrawn quitta la passerelle, laissant Rommor à sa colère silencieuse. Il était probable qu’à sa façon de joueur d’échecs Divoriens, Thrawn essayait de provoquer une réaction qui trahirait Cabb ; l’amiral devait faire surveiller toutes les communications, attendant que le Protecteur prévienne les insurgés… Et révèle ainsi leur position.

 

Et voilà, Rommor était à présent dans une position pouvant faire échouer l’une ou l’autre des opérations, pour lui la situation se résumait encore à ce choix auquel il ne pouvait se résoudre: sauver son père ou bien tuer l’Empereur.

 

_ Vos ordres Monsieur ?

 

Beaucoup de gens avaient mis leur vie en jeu pour assurer le succès de l’opération Chimère, il n’avait pas le droit de les trahir pour sauver son père… Ce fut un déchirement terrible, mais sa décision était prise.

 

_ Second, à vous le quart ; assurez vous que nous passerons en hyperespace quelques secondes après le Vanguard.

 

Rommor pouvait déjouer la surveillance de Thrawn en larguant une sonde programmée afin d’aller prévenir le grand amiral Zaarin, s’il le faisait juste après le départ du Vanguard. Il devait faire ça par lui-même ; le commandant du Protecteur enfila les coursives les unes après les autres, d’un pas décidé ; se dirigeant vers la zone de conditionnement des sondes. Concentré sur son objectif, il ne remarqua pas qu’il était suivi.

 

Rommor entrait manuellement les coordonnées via le panneau de maintenance de la sonde, lorsque la porte qu’il avait verrouillée s’ouvrit en sifflant.

 

_ Soldat, saisissez-vous du capitaine !

 

Les troupes de choc firent irruption dans la pièce, Rommor était désarmé et affreusement surpris ; dans l’encadrure de la porte, le blaster au poing, l’enseigne Torjul le dévisageait, l’air sombre.

 

_ Plus jeune, je vous admirais capitaine… Comment un homme comme vous, un héros de l’Empire, a-t-il pu devenir un traître ?

 

Un des soldats des troupes de choc observa la console de la sonde.

 

_ C’est bien un message à l’attention des insurgés.

_ Communiquez immédiatement ces coordonnées au vice amiral Thrawn à bord du Vanguard.

_ A vos ordres !

 

Tout était fini… La silhouette trapue d’Aves Porter apparut alors derrière l’enseigne Torjul.

 

 

Ce fut rapide et improbable, le vieil homme avait une vigueur et une célérité défiant ce que Rommor avait pu voir par le passé, à la possible exception de son père. Il brisa le cou de Torjul entre ses doigts comme s’il s’était agi d’une nuna, puis il abattit froidement les trois soldats des troupes de choc en gardant de l’autre main le cadavre comme bouclier.

 

Lorsque le corps flasque de Torjul glissa sur le pont, Porter avait déjà franchi la moitié de la distance le séparant de Rommor. Il leva son blaster et lui tira dans la cuisse, déviant son tir pour le blesser seulement. Rommor hurla de douleur.

 

_ Voilà, vous avez votre traître à présent.

 

Le petit homme aux cheveux gris se retourna vers la sonde et acheva sa programmation avant de la lancer ; un bras mécanique la fit quitter son berceau pour se diriger vers le tube de lancement. Rommor regardait cet homme avec une certaine amertume, il avait eu un doute au sujet de son intendant, mais rien de concluant.

 

_ Alors vous êtes un rebelle…

_ Détrompez-vous, je n’ai rien à voir avec votre mère ou l’Alliance Rebelle.

_ Oh, et qui êtes-vous alors, un homme de Zaarin ?

 

Mais Porter était déjà à l’écoutille, blaster au poing et prêt à s’enfuir.

 

_ Je suis un frère depuis longtemps perdu, Irius… Donnez moi une minute et sonnez l’alarme.

_ Adieu.

_ Nous nous reverrons, soyez-en sûr comme du fait que le soleil finit toujours par poindre à l’horizon.

 

Et il disparut.

 

 

 

[SYSTEME OTTEGA, OPERATION CHIMERE H+3]

 

Les deux destroyers de classe victoire surgirent de l’hyperespace, accompagnés par un essaim de chasseurs TIE hypercapables ; ils se ruèrent sus à l’immense destroyer de classe impérial, fonçant tête baissée alors que leurs déflecteurs se chargeaient lentement.

Thrawn savait à qui il avait affaire, ses renseignements sur le Majestic et son équipage, ainsi que la sonde lancée par le traître Aves Porter l'avaient amené à la conclusion que l'Empereur serait mené vers la tête de la conspiration: Demetrius Zaarin, et son vaisseau amiral, le Gloire. Rommor ne pouvait que s'avouer complètement dépassé par la capacité d'analyse et de planification tactique de Thrawn.

Les redoutables chasseurs stellaires du seigneur Vador devraient supprimer les chasseurs insurgés pour récupérer la navette de l’Empereur, pendant ce temps, Thrawn et Cabb occuperaient le Gloire.

 

Le choc fut rude, les deux destroyers décélérèrent sur les bords inférieurs du Gloire, le pilonnant avec leurs batteries de canons à ions pour affaiblir ses boucliers ; le vaisseau insurgé n’avait pas cette amabilité, et jugeant les déflecteurs de ses ennemis encore très faibles, tira directement au turbolaser. Les secousses et les explosions fleurirent sur les vaisseaux loyalistes, mais ils tenaient bon.

 

Rommor assistait à la scène depuis son siège sur la passerelle ; même blessé, c’était la moindre des choses qu’il puisse faire s’il comptait éviter le châtiment pour la trahison de son intendant. Mais Porter avait fait tout cela pour éviter la compromission à son capitaine, même si sa motivation restait inconnue, il ne fallait pas gâcher ce geste ; Rommor avait fait ce qui était en son pouvoir pour aider Zaarin, et ce malgré le fait que les insurgés l’aient évincé de l’opération Chimère. Porter… Il serait temps plus tard de s’interroger sur la véritable identité de cet homme affable, fin cuisinier, capable de tuer quatre soldats armés sans sourcilier, et de voler un chasseur stellaire expérimental pour s’enfuir d’un destroyer impérial en pleine alerte sécurité.

 

_ Capitaine, le Gloire bat en retraite !

 

Rommor était écœuré ; l’Empereur était à portée de main, un destroyer de classe impérial pouvait faire aisément jeu égal avec deux victoire… Et Zaarin s’enfuyait, rendant vains tous les sacrifices qui avaient mené à ce jour décisif ; les rebelles eux, seraient restés et auraient combattu jusqu’à la mort pour atteindre leur objectif.

 

_ Le sale lâche.

 

Le commandant du Protecteur avait à présent la certitude que sa mère avait raison à propos du leader des insurgés, c’était un homme qui faisait prendre les risques à d’autres pour son profit personnel… Une noire colère envahit Rommor. Le Gloire changeait de cap, redirigeant son tir sur la navette de l’Empereur, Zaarin avait finalement abandonné son idée de capturer l'Empereur.

 

« Mon père… Non, je vaux mieux que ça! »

 

L’idée était étrange, comme si ce n’était pas la sienne ; néanmoins Rommor prit une grande inspiration et distribua ses ordres.

 

_ Timonier, interposez le Protecteur entre le Gloire et Imperial One ! Tactique, pleine puissance aux boucliers.

_ A vos ordres !

 

Cette scène suintait soudain d’un fanatisme étranger aux membres d’équipage du Protecteur, quelque chose ne cadrait pas, impossible cependant de mettre le doigt dessus. Les tirs frappèrent directement la superstructure du victoire-II ; des geysers de feu, d’air et d’êtres humains expulsés dans l’espace surgirent sous les yeux étrangement fascinés de l’équipage sur la passerelle, alors qu’intérieurement, leurs voix hurlaient d’horreur à l’unisson.

 

Puis le Gloire sembla s’arrêter avant de disparaître en passant la barre de l’hyperespace, l’hébétude perdura quelques dizaines de secondes sur la passerelle du Protecteur, puis la vie reprit ses droits alors que les rapports de dommages affluaient des sections touchées durant la bataille.

 

_ Imperial One apponte sur le Vanguard, la bataille est terminée.

 

Dans la distance on pouvait détailler la navette lambda entourrée de chasseurs impériaux aux formes diverses, se dirigeant vers le pont hangar du Vanguard. Il n’y eut aucune exclamation de victoire ; Rommor le savait, quasiment tous ses membres d’équipage étaient des spationautes raisonnables, il les avait sélectionnés dans le dessein de pouvoir un jour les retourner contre l’Empereur… Et aujourd’hui ? ils venaient de lui sauver la vie. Ressentaient-ils tous ce même goût amer et étrange d’avoir été un instant dépossédés de leur âme ? De leur destin ? Impossible à dire. Rommor se redressa en grimaçant, le béret rouge de faction vînt immédiatement l’aider à se tenir debout ; vidé, il déclara à ses hommes.

 

_ Messieurs-dames, l’Empire est sauf... grâce à vous. Second, vous avez la barre.

_ Le second prend le quart.

 

Il allait y avoir tout un tas d’explications désagréables à fournir d’ici que les vaisseaux rentrent à Coruscant, mieux valait s’y préparer... Mais en silence, Rommor imagina un petit garçon qui lui ressemblait étrangement serrer sa main.

« Merci mère, vous aviez raison. »

 

 

 

 

[PALAIS IMPERIAL, CORUSCANT, OPERATION CHIMERE J+12]

 

La salle de réception dans laquelle se tenait l’assemblée était une des plus petites du palais, pour donner un côté « intimiste » à cette cérémonie sûrement… Rommor était loin de se douter qu’un an plus tard, il volerait quelques heures de sommeil dans cette salle, avec un groupe de combattants sales et hagards, pour assister à la chute de l’Empire et au dernier combat de son père. Finalement, il ne lui avait acheté qu’un court répit, et ils n’auraient guère le temps de rattraper tout ce que l’Empire leur avait pris de leur vie de famille.

 

Mais à cet instant précis, Rommor Irius Cabb n’y songeait pas, car contrairement à certains arpentant le chemin, il ne pouvait le discerner avec autant de clarté. Son esprit était encore troublé, par l’échec, sa lâcheté, le mystère Porter… Mais il était passé entre les gouttes, en fait, ce monstrueux gâchis lui avait même un peu profité.

 

_Commodore ?

 

Rommor se retourna, faisant face à la mystérieuse envoyée de l’Empereur ; elle était toujours aussi sublime qu'au jour de leur rencontre, peut-être même plus en ayant pris en maturité. Portant une robe bleu nuit, qui mettait en valeur ses cheveux couleur de feu et ses yeux de jade, la « danseuse » portait pour seul bijou, une épaulette à motif Xyquine ouvragée tenant sa robe.

 

_ Madame.

_ Mademoiselle.

_ Comment allez-vous ?

_ Bien ; est-ce moi ou bien est-ce la première fois que vous vous montrez aussi cordial avec moi, depuis que nous nous connaissons ?

_ J’ai pourtant bien le souvenir d’une danse que vous m’avez accordée sur Naboo.

_ Allons, je sais quand j’embrasse un homme et que son cœur n’y est pas ; comment vont votre épouse et vos enfants ?

_ Fort bien, je n’ai pas à m’inquiéter de ce côté.

 

Il fallait se montrer inflexible, tout était sujet à menaces et pressions à la cour... Spécialement en ces temps troublés.

 

_ Vous avez de l’allure quand vous êtes en colère, commodore.

_ Allons, vous ne m’avez jamais vu en colère mademoiselle.

_ Cela doit être un spectacle intéressant, en effet.

_ Peu sont encore là pour en parler.

_ Et votre intendant ?

 

Rommor croisa les mains dans son dos, jaugeant son interlocutrice un moment ; sourire charmeur, comme si elle ne prenait pas cette conversation au sérieux… Alors qu’il s’agissait d’un interrogatoire dans les formes.

 

_ C’est là l’affaire de mes anciens collègues du renseignement, cet individu les a humiliés en prenant leur agent de court. Pour ma part, je ne suis qu'un officier de la marine de sa majesté ; je dois m’occuper de commander ses navires et gagner des batailles, ce que je fais plutôt bien si j’en juge par ma promotion.

_ C’est vrai, félicitations, vous avez sauvé l’Empereur.

_ J’ai prêté serment de défendre l’Empire, je m’y emploie au mieux de mes capacités.

_ Vous aurez encore beaucoup d’occasions de servir l’Empereur je crois.

 

En effet, une personne fendait la foule d’un pas tranquille, venant dans la direction de Rommor et de la femme fatale. Il se détachait de la foule tant par son uniforme blanc, que par sa peau bleutée.

 

_ Commodore, nous avons à parler.

_ Bien monsieur.

 

Après un rapide salut à la compagne de Rommor, les deux officiers s’excentrèrent vers une galerie solitaire.

 

_ Le temps n’est pas aux réjouissances, le traître Zaarin court toujours et sa petite flotte personnelle a déjà lancé des raids sur plusieurs de nos dépôts dans la bordure extérieure.

_ La flotte principale et le seigneur Vador ne sont-ils pas à sa poursuite ?

_ Non, l’Empereur a d’autres plans pour eux. Il m’a confié la tâche de traquer l’ex-grand amiral et ses complices, je veux que votre cinquante septième escadre rejoigne ma force d’intervention. Le nom de code de cette mission sera Ouragan, recherche et destruction, c’est là une tâche à laquelle vous excellez je crois.

 

Rommor s’arrêta, contemplant les lumières de la cité planète à leurs pieds... Il espérait bien échapper à cette épreuve, mais il était évident que sa loyauté serait encore mise à l'épreuve.

 

_ Honnêtement, je ne crois pas être l’homme que vous voudriez pour vous seconder ; au vu de mes relations passées avec l’ex grand amiral Zaarin, il semble que ma loyauté soit questionnée par l’Ubiqtorat… Cela expliquerait qu’ils aient retourné mon navigateur pour m’espionner.

_ Pensez-vous que je n’aie pas pris en compte cet élément ? J’ai conscience de vos sentiments ambigus vis à vis de l’Empereur, mais je sais aussi qu’ils ne surpasseront jamais votre instinct de survie… Zaarin est fini, son coup d’état a échoué ; vous vous rangez du côté des vainqueurs, votre manœuvre à Ottega l’a prouvé. Quant à cette question de confiance, vous venez d’être promu commodore à vingt-neuf ans, c’est un geste assez clair de la part de sa majesté.

 

Thrawn avait cette faculté aussi bien exaspérante qu’impressionnante d’anticiper les réactions des gens, parfois il semblait les comprendre mieux qu’ils ne se connaissaient eux-mêmes, sûrement parce qu’il était plus objectif.

 

_ Nous appareillons dans trois jours, je vous suggère de revenir à de meilleurs sentiments d’ici là, commodore.

_ Amiral, le Protecteur n’aura jamais réparé ses avaries d’ici trois jours.

_ Le Protecteur nous rejoindra plus tard, vous prendrez le commandement de mon vaisseau de pavillon, l’ISD Grey Wolf ; procédez à tous les transferts de personnel que vous estimerez nécessaires.

 

Le Grey Wolf était un destroyer de classe Impérial-I, le vaisseau amiral de Thrawn durant la campagne de Nami à la tête de la 303ème escadre de croiseurs lourds. La majorité de l’équipage répondait donc aux standards opérationnels très élevés du nouvellement promu grand amiral, et d’un autre côté, il pourrait garder ainsi un oeuil attentif sur Rommor.

 

_ Allez saluer les convives puis mettez-vous immédiatement au travail avec notre état major ; mon communicateur reste branché.

_ A vos ordres amiral.

 

Rommor se força en un salut rigide, claquant légèrement des talons tout en se promettant de mettre à profit cette liberté surveillée pour apprendre autant qu'il le pourrait de l'étrange officier général non-humain ; mieux valait évoluer dans l'aura du grand amiral Thrawn que dans l'ombre méphitique du seigneur Vador.

 

« Notre jour viendra... Le soleil finit toujours par poindre à l'horizon. »

 

Créé le lundi 24 septembre 2007 à 23h30 par Guinch & mis à jour le mardi 2 octobre 2007 à 22h34